L'Europe à la croisée des chemins: financer l'Ukraine par les avoirs russes gelés
L'Union européenne se trouve aujourd'hui face à un défi majeur qui pourrait redéfinir sa capacité d'action géopolitique pour les années à venir. Avec le retrait annoncé du soutien américain à l'Ukraine sous l'administration Trump, les Européens doivent désormais assumer seuls l'essentiel du financement de Kiev, une responsabilité qui teste leur unité et leur détermination.
Un enjeu existentiel pour l'Europe
Le chancelier allemand Friedrich Merz a exprimé avec justesse l'ampleur de l'enjeu: "Si nous n'arrivons pas à le faire, la capacité d'action de l'Union européenne sera gravement compromise pour des années, et même plus longtemps". Cette déclaration souligne la dimension stratégique de ce sommet européen décisif.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky se rendra personnellement à Bruxelles pour plaider sa cause auprès de ses alliés européens, témoignant de l'urgence de la situation après près de quatre années de conflit.
Deux voies possibles, un choix crucial
Face à cette situation, deux options principales s'offrent aux dirigeants européens. La première consiste en un emprunt collectif de l'UE, mais cette solution se heurte aux réticences de plusieurs États membres, notamment l'Allemagne, et à l'opposition ferme de la Hongrie. L'exigence d'unanimité rend cette voie particulièrement ardue.
La seconde option, plus prometteuse, concerne l'utilisation des avoirs russes gelés. Ces fonds, d'un montant considérable de 210 milliards d'euros, sont principalement détenus en Belgique sous le contrôle d'Euroclear, institution financière bruxelloise. Cette solution permettrait de financer un "prêt de réparation" de 90 milliards d'euros en faveur de Kiev.
Une solution européenne innovante
Cette approche présente des avantages indéniables qui expliquent le soutien d'une large majorité des pays européens. Elle ne coûte rien aux contribuables, démontre l'engagement européen aux côtés de l'Ukraine et affirme l'indépendance européenne face aux négociations menées par Washington.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a souligné devant le Parlement européen que ces avoirs russes "peuvent changer la donne pour l'Europe et pour l'Ukraine", qualifiant cette période de "moment de l'indépendance de l'Europe".
Les réticences belges, un défi à surmonter
Cependant, la Belgique, détentrice de ces avoirs, exprime des préoccupations légitimes. Le Premier ministre belge Bart De Wever craint les représailles juridiques et financières de Moscou et refuse que son pays porte seul les conséquences de cette décision.
Des mécanismes de protection complexes sont actuellement en discussion pour rassurer la Belgique et favoriser un accord. Les négociateurs européens travaillent à trouver un équilibre entre les garanties demandées et les limites acceptables pour les autres États membres.
Vers une solution européenne unie
Malgré les défis, les sources diplomatiques se montrent confiantes: "il y aura un soutien financier pour l'Ukraine". Si nécessaire, la décision pourrait être prise à la majorité qualifiée, démontrant la détermination européenne.
Le président du Conseil européen, Antonio Costa, qui dirigera ces discussions cruciales, s'est déclaré prêt à prolonger les débats autant que nécessaire pour éviter un échec qui ternirait l'image de l'Europe sur la scène internationale.
Cette crise révèle finalement la maturité croissante de l'Europe dans sa capacité à assumer ses responsabilités géopolitiques et à affirmer son autonomie stratégique face aux défis contemporains.